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29 avril 2022

La première liste de communes menacées par l’érosion publiée

Le décret n°2022-750 établissant la liste des communes dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entrainant l’érosion du littoral a été publié le 29 avril 2022.

L’ordonnance n°2022-489 du 6 avril 2022 relative à l’aménagement durable des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte a été publiée le 6 avril 2022. Retrouvez l’avis déposé par l’ANEL dans le cadre de la consultation du public :

Avis de l’Association Nationale des Elus du Littoral sur le projet d’ordonnance , par Anne-Sophie Leclere , le 24 mars 2022 à 18h13

  • Le Conseil National de la Mer et des Littoraux n’a pas été saisi pour avis sur le projet d’ordonnance « aménagement durable des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte ». Dans ce contexte, l’Association Nationale des Elus du littoral fait part de son avis dans le cadre de la consultation du public.

    La Plateforme « Vie Publique » ne permettait pas d’accéder à la consultation du public (qui se déroule du 3 au 24 mars) en cliquant sur le lien qui renvoie sur le site du Ministère de la Transition Ecologique. Ce problème technique a été résolu le 21 mars 2022.

    Les modalités de consultation, tant des instances que du public, imposées sur un texte d’une telle importance, ne permettent pas de garantir un travail de concertation et d’analyse des impacts de tous ordres pour l’ensemble des acteurs concernés et notamment les communes s’étant vues transférer la gestion du recul du trait de côte ainsi que les propriétaires des biens concernés.

    Le projet d’ordonnance suscite encore de nombreuses questions, en termes de respect du droit, de partage des responsabilités et charges entre l’Etat et les collectivités, d’atteinte à la propriété, d’inégalité de traitement, ainsi que de mise en œuvre et de financements des dispositions opérationnelles qui sont présentées.

    Les flous juridiques mentionnés ci-après laissent présager de nombreux contentieux, susceptibles de nuire à l’atteinte des objectifs affichés.

    1. Sur l’indéfinition des termes employés

    L’article 239 de la loi Climat et Résilience, codifié à L.321-15 du code de l’environnement, prévoit l’identification, dans une liste fixée par décret, des communes dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées « aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral ». Le texte précise que cette liste est élaborée « en tenant compte » de la particulière vulnérabilité de leur territoire « au recul du trait de côte ». La loi cible ainsi expressément un phénomène naturel, « l’érosion du littoral sous l’effet des phénomènes hydrosédimentaires ». Si elle prévoit la prise en compte du « recul du trait de côte », elle distingue néanmoins ces deux concepts qui recouvrent des réalités géographiques différentes.

    Or le projet d’ordonnance évacue le terme « érosion du littoral » pour employer exclusivement l’expression « recul du trait de côte », voire « adaptation au changement climatique » pour la désignation du nouveau bail réel immobilier.

    Cette substitution n’est pas neutre : l’expression « recul du trait de côte » est susceptible d’appréhender les évolutions associées non seulement à l’érosion côtière mais également à la montée du niveau de la mer. Cette approche viendrait donc considérablement étendre le périmètre des enjeux exposés en s’écartant des termes de la loi.

    Il paraît donc indispensable que l’ordonnance définisse les termes qu’elle emploie afin d’assurer la parfaite légalité, lisibilité et applicabilité des dispositifs qu’elle entend mettre en place.

    2. Sur l’adaptation des outils de maitrise foncière et la définition d’une méthode d’évaluation des biens exposés au recul du trait de côte

    Ces dispositions ne respectent pas les termes de l’habilitation législative :
    –  D’une part, elles ne précisent pas les conditions de prise en compte de « l’état des ouvrages de protection » et des « stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte » alors qu’une telle prise en compte est expressément exigée au point 3°) de l’article 248 de la loi ;
    –  D’autre part, alors qu’elles introduisent le recours à l’expropriation, elles ne prévoient aucune « mesure d’accompagnement » de celle-ci bien que la loi dispose que celles-ci doivent être prévues « le cas échéant ».
    Ces deux carences interrogent sur la légalité du projet d’ordonnance.

    Ces dispositions soulèvent en outre de nombreuses interrogations :
    –  En instaurant une évaluation de la valeur des biens en priorité par référence à des mutations portant sur des biens avec un niveau d’exposition similaire situés dans la zone d’exposition au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans, et par défaut en faisant application d’un abattement tenant compte « de la durée limitée avant la disparition du bien », ces dispositions n’auront aucune incidence sur les territoires littoraux où le marché de l’immobilier sera suffisamment dynamique pour que des mutations continuent à s’opérer à des prix élevés, même en front de mer. En revanche, elles viendront grever les biens localisés sur les territoires les moins attractifs, entravant la capacité des occupants à se reloger.
    –  La fixation de la date de référence prévue à l’article L. 322-2 à « la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme ou la carte communale et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien » semble d’ailleurs faire obstacle à la prise en compte de l’impact que cette délimitation pourrait avoir sur les prix du marché.
    Ceci fait douter de l’efficacité et de la justesse de ce mécanisme contrairement aux objectifs affichés par le législateur.

    –  Le projet d’ordonnance prévoit la prise en compte de la « durée totale prévisionnelle avant la disparition du bien exprimée en années depuis la date d’entrée en vigueur du premier plan local d’urbanisme ou du premier document en tenant lieu ou de la première carte communale intégrant les dispositions de l’article L. 121-22-2 », sans préciser comment cette durée est estimée.
    Le zonage réglementaire des biens exposés au recul du trait de côte à horizon 2030 ne saurait constituer une base suffisante pour apprécier la durée résiduelle de chacun des biens situés au sein de celle-ci : celle-ci exige une approche nuancée selon la localisation exacte du bien au sein de cette zone et actualisée à la date de l’évaluation.

    Cette appréciation suppose également que les conditions de prise en compte d’éventuels ouvrages de protection et des stratégies locales de gestion du trait de côte aient été légalement définies.

    La constitutionnalité d’une approche forfaitaire qui est susceptible d’aboutir à considérer comme nulle la valeur des biens selon la durée résiduelle, estimée dans des conditions ou sur des méthodes qui ne sont pas ici précisées peut être questionnée.

    Se pose également la question de la constitutionnalité d’une décote qui s’appliquerait en cas de préemption ou d’expropriation par la puissance publique mais qui n’aurait aucun impact sur la valorisation antérieure du bien par l’administration fiscale (calcul des droits de succession, TFPB, ISF,…).

    En outre, le projet d’ordonnance étend l’application de cet abattement aux biens qui, également exposés à l’un des risques naturels actuellement visés à l’article L.561-1 du code de l’environnement, feraient l’objet d’une expropriation au titre du Fonds Barnier.
    Une telle extension, qui remet en cause le fonctionnement du dispositif de prévention des risques naturels majeurs, n’est prévue ni par la loi ni par l’habilitation confiée au Gouvernement.

    Elle conduit à soumettre à des règles d’indemnisation différente des biens exposés aux mêmes phénomènes selon qu’ils sont, ou non, localisés sur le territoire d’une commune dotée d’un zonage réglementaire du recul du trait de côte.

    Cette différence de traitement n’est pas justifiée par une différence de fait mais par une différence de traitement administratif, résultant notamment de l’absence de réalisation par l’Etat de PPRL sur les territoires concernés antérieurement à l’entrée en vigueur de la Loi Climat et Résilience et du choix, par la suite, des communes de s’y substituer.

    Cette approche interroge également sur le plan de la constitutionnalité.

    –  Cet abattement est conçu pour s’appliquer sans prendre en compte la différence de situation des biens exposés à une érosion provoquée ou aggravée par la présence d’ouvrages maritimes transversaux qui, tels que les ports et digues, dont la présence, indépendante de la volonté des collectivités et des propriétaires des biens exposés, entravent la dérive sédimentaire.
    Cette situation concerne de nombreux biens qui sont exposés à une érosion importante et continue depuis la création de l’ouvrage. Celle-ci s’apparente alors à un dommage de travaux publics.

    Nous interrogeons la constitutionnalité d’un dispositif qui fait supporter par la victime d’un préjudice la dépréciation du bien qui en résulte.

    –  Le projet d’ordonnance permet aux collectivités et aux établissements publics compétents des collectivités ou de l’Etat, de constituer des réserves foncières, et ainsi de recourir à l’expropriation, « en vue de prévenir les conséquences du recul du trait de côte sur les biens situés dans les zones exposées au recul du trait de côte définies en application de l’article L. 121-22-2 du code de l’urbanisme ». Dans la zone exposée au recul du trait de côte à horizon de 30 ans, le dispositif d’évaluation de la valeur des biens précédemment critiqué trouve à s’appliquer.
    Cette rédaction est imprécise :
    o Dans quelles zones de telles réserves peuvent-elles être constituées ? En l’état, cette disposition semble admettre que des expropriations interviennent en dehors des secteurs exposés, pour « prévenir » les conséquences du recul sur les biens situés à l’intérieur de celles ;
    o Quels sont précisément les projets urbains visés par le projet d’ordonnance comme étant susceptibles de « prévenir » de telles « conséquences » ?

    Le recours à l’expropriation constituant une atteinte directe au droit de propriété, nous doutons de la constitutionnalité de dispositions aussi vaguement définies.

    3. Sur les dispositions relatives au bail réel d’adaptation au changement climatique

    Ces dispositions appellent les observations suivantes :

    –  L’intitulé du bail (« bail réel d’adaptation au changement climatique ») est beaucoup plus large que son périmètre légal d’application (zones exposées au recul du trait de côte). Cette différence terminologique mérite une clarification pour ne pas susciter de confusion.

    –  Le projet de bail fait supporter au bailleur les coûts de démolition, dépollution et renaturation du bien loué à l’expiration du bail, introduisant une dérogation au principe de prise en charge de la démolition des constructions nouvelles par les pétitionnaires dans les zones exposées au recul du trait de côte à horizon 100 ans. En outre, le projet de bail fait supporter à la collectivité les éventuels coûts de dépollution. Qu’en est-il alors de la responsabilité de l’exploitant d’un site pollué en fin d’activité ?

    La collectivité aura précédemment financé l’acquisition du bien, sans que la méthode d’évaluation proposé dans l’ordonnance ne fasse référence à la prise en compte des futurs coûts de démolition, de renaturation ou éventuellement de dépollution.

    Le cumul de ces charges fait sérieusement douter de l’opérationnalité de ce dispositif dont le cadrage juridique est très élaboré mais dont le montage économique et financier reste improbable pour des biens dont la valeur à terme est supposée nulle. Ce montage ne conduit-il pas à des transferts de charges non compensés aux collectivités ?

    –  Le projet d’ordonnance prévoit que le bail est « résilié de plein droit à la date de l’arrêté du maire de la commune pris en application des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, ou de l’arrêté du préfet pris en application de l’article L.2215-1 de ce même code, prescrivant les mesures nécessaires lorsque l’état du recul du trait de côte est tel que la sécurité des personnes ne peut plus être assurée ». (Article 5)

    Par cette disposition, le projet d’ordonnance reconnaît donc que le recul du trait de côte ne constitue pas « un phénomène progressif pouvant être anticipé », comme l’affirmait de façon erronée l’étude d’impact du projet de loi Climat et Résilience (p.534) : il provoque des situations d’urgence exigeant la mobilisation des pouvoirs de police, pouvant conduire à l’évacuation des biens concernés – et en l’occurrence, à la résiliation brutale du bail. A noter qu’une tribune signée par 40 scientifiques venait déjà contredire l’affirmation du caractère prévisible du recul du trait de côte.

    Reconnaissant cette réalité, le projet d’ordonnance n’en tire cependant pas toutes les conséquences :
    o Dans cette situation de risque d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens, comment la collectivité preneuse pourra-t-elle assurer la démolition/dépollution/renaturation du bien ?

    o Quel serait le sort des autres biens concernés par l’arrêté de police et, notamment, frappés d’une mesure d’évacuation permanente – l’instar de l’immeuble Le Signal ?

    Selon le projet d’ordonnance, leur exposition à un risque imminent devrait conduire à considérer leur durée résiduelle, et donc leur valeur en cas d’expropriation, comme étant nulle s’ils sont situés sur le territoire d’une commune couverte par une cartographie locale.
    Sur le territoire des autres communes littorales, aucune règle ni dispositif particulier ne viendrait s’appliquer.

    Le projet d’ordonnance reste donc très insuffisant : contrairement aux termes de l’habilitation, il est loin de « définir ou d’adapter les outils d’aménagement foncier et de maîtrise foncière nécessaires à l’adaptation des territoires exposés au recul du trait de côte », de fixer sur l’ensemble du littoral « les modalités d’évaluation des biens exposés au recul du trait de côte » ainsi que définir « les modalités de calcul des indemnités d’expropriation et les mesures d’accompagnement ».

    4. Sur les dispositions relatives aux dérogations limitées et encadrées au chapitre 1er du titre II du livre 1er du code de l’urbanisme nécessaires pour la mise en œuvre d’un projet de relocalisation durable

    Le projet d’ordonnance soumet le bénéfice de ces dérogations à deux séries de conditions :
    –  Des conditions relatives au projet dans lequel s’inscrit la demande de dérogation : il doit faire l’objet d’un contrat de projet partenarial portant sur une opération d’aménagement ayant pour objet la recomposition spatiale du territoire d’une commune « figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 121-22-1 du présent code » (cette rédaction semble erronée : s’agit-il de toutes les communes identifiées sur la liste fixée par le décret prévu à l’article L.321-15 du code de l’environnement ou de celles étant couvertes par la cartographie ?) ;

    –  Et des conditions relatives aux motifs et à la portée de la dérogation : la dérogation doit être justifiée par l’impossibilité de relocaliser « au sein ou en continuité de l’urbanisation », elle ne doit pas « porter atteinte à l’environnement et aux paysages » et être autorisée par l’Etat en ayant recueilli l’avis, le cas échéant conforme, de la CDNPS.

    Le principe de libre administration des collectivités interroge sur la validité de ce cumul de conditions : quels motifs, en lien avec l’objectif poursuivi par la loi, justifient que ces dérogations soient exclues pour les communes continuant d’être couvertes par un PPRL et qu’elles soient, au surplus, conditionnées par la conclusion d’un contrat de projet partenarial d’aménagement signé par l’Etat.

    5. Sur les dispositions particulières d’adaptation en Outre-mer pour la zone littorale dite « des cinquante pas géométriques »

    Le projet d’ordonnance introduit deux séries de dispositions :

    –  L’article 8 contient des dispositions particulières à la zone des cinquante pas géométriques de la Guadeloupe et de la Martinique.
    Dans les zones d’urbanisation diffuse et les espaces urbains, dans lesquelles le déclassement d’une parcelle est autorisé en vue de sa cession à titre onéreux à ses occupants, le projet d’ordonnance précise que l’évaluation « tient compte le cas échéant du niveau d’exposition du bien au recul du trait de côte lorsqu’il est situé dans une zone définie en application du 1° de l’article L. 121-22-2 du code de l’urbanisme ».
    Cette disposition ne précise aucunement comment ce niveau d’exposition est concrètement apprécié. Surtout, son sens interroge. Les articles L.5112-5 et L.5112-6 précisent que la cession à des personnes privées « ne peut être effectuée lorsque la construction est située dans une zone exposée à un risque naturel prévisible menaçant gravement des vies humaines ».
    En admettant que de telles cessions soient néanmoins réalisées, avec une décote, pour des biens exposés au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans, le projet d’ordonnance procède à un revirement : il conduit à une différence de traitement difficilement justifiable entre les terrains couverts par un PPRL (cessions interdites) et ceux couverts par une cartographie communale (cessions autorisées) et organise, de façon contraire à l’objet même de la loi, la pérennisation des enjeux les plus immédiatement exposés.

    La révision de ces dispositions parait donc indispensable, nécessitant également de traiter les conditions d’accompagnement prévues par l’habilitation et absentes de l’ordonnance.

    –  L’article 9 contient des dispositions particulières à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion et Mayotte.
    Le projet d’ordonnance étend les contraintes d’urbanisation qui s’appliquent, selon les termes de la loi, aux « espaces non urbanisés » de la zone d’exposition au recul du trait de côte à horizon de 30 ans, aux « parties non urbanisées au sens de l’article L. 121-46 et dans les secteurs occupés par une urbanisation diffuse au sens de l’article L. 121-49 » du code de l’urbanisme. Dans cette seconde catégorie de secteurs, seuls sont déjà autorisés « l’adaptation, le changement de destination, la réfection, la reconstruction et l’extension limitée des constructions existantes ».

    Le projet d’ordonnance vient donc supprimer l’ensemble de ces possibilités. Une telle modification interroge :
    o Elle introduit une différence complète de traitement entre les biens situés en zone d’urbanisation et ceux situés en zone d’urbanisation diffuse, jusqu’à interdire l’adaptation et la réfection des biens situés dans la seconde. Une telle différence de traitement paraît excessive et injustifiée, voire contraire à l’objectif d’adaptation poursuivi par la loi ;
    o Elle conduit, encore, à traiter différemment des biens en fonction non de la réalité de leur exposition au recul du trait de côte, mais en fonction de l’existence arbitraire d’une cartographie locale.

    Ces dispositions sont donc contestables. Elles sont, en outre, bien en deçà de l’habilitation qui confie au Gouvernement la tâche plus générale de « prévoir des mesures d’adaptation en outre-mer » : elles sont d’évidence bien insuffisantes pour faire face aux enjeux particuliers que suscite l’adaptation de ces territoires majoritairement insulaires.

  •  Contribution du Pôle métropolitain Caen Normandie Métropole , par SAINTE-ROSE Aymie , le 24 mars 2022 à 17h22

    Le projet d’ordonnance parle bien de « renaturation » pour les immeubles et aménagements amenés à être démolis dans une zone de recul du trait de côte. Cette « renaturation » comptera-t-elle dans le bilan du Zéro artificialisation nette prévu à l’article L101-2-1 du Code de l’urbanisme ? Ce point est primordial, et il interroge également le Projet de décret relatif à la nomenclature de l’artificialisation des sols pour la fixation et le suivi des objectifs dans les documents de planification et d’urbanisme. Les territoires littoraux du SCoT Caen-Métropole demandent que la renaturation qui sera réalisée dans le cadre du recul du trait de côte intègre le bilan du ZAN et donc permette de réaliser de la relocalisation stratégique (qui impliquera nécessairement une certaine forme d’artificialisation).

    Le projet d’ordonnance consacre qu’un bien non soumis à érosion ne peut avoir la même valeur qu’un bien dont la durée de vie est limitée. Le projet prévoit donc qu’une décote proportionnelle à la durée de vie résiduelle prévisible d’un bien situé en zone d’exposition au recul du trait de côte. C’est un point important d’évolution du droit, qui est nécessaire pour permettre aux collectivités et aux autres acteurs publics ou parapublics d’aménager le territoire avec le recul du trait de côte. Cependant, les impacts socio-économiques de cette mesure ont-ils été étudiés ? La bande littorale de la Côte de Nacre, sur le SCoT Caen-Métropole, est urbanisée à hauteur de 89% et elle sera en partie soumise au recul du trait de côte. Pourtant, le prix des biens immobiliers a crû a un rythme soutenu ces derniers mois. Le projet d’ordonnance amène une rupture de paradigme qu’il conviendra d’expliquer aux citoyens.

    Selon les estimations du Cerema, et si l’on ne prend en compte que l’habitat, entre 5 000 et 50 000 logements d’ici 2100 seraient concernés en France par un risque d’érosion littorale. Les départements de l’Ouest de la Normandie (Manche et Calvados) sont particulièrement concernés. Les collectivités littorales et les autres acteurs publics ou parapublics auront-ils les capacités financières pour réaliser la maîtrise foncière, la déconstruction et la dépollution des zones soumises au recul du trait de côte ? Quel sera l’accompagnement financier de l’Etat pour maîtriser le foncier à risque et réaliser le recul stratégique ?