Retrouvez l’article issu de l’actualité Localtis de la Banque des Territoires du 8 juillet 2019 :
Le décret – accompagné d’un arrêté d’application – visant à intégrer, au sein du code de l’environnement, des dispositions particulières aux plans de prévention des risques naturels (PPRN) prévisibles pour les aléas « débordement de cours d’eau » et « submersion marine » est paru au Journal officiel ce 7 juillet. Les articles R. 562-1 à 11 du code de l’environnement fixent le périmètre ainsi que les modalités et les procédures d’élaboration du PPRN, servitude d’utilité publique annexée au plan local d’urbanisme (PLU), qui constitue aujourd’hui l’outil central pour la prise en compte des risques naturels dans les politiques d’aménagement, afin de réduire la vulnérabilité des personnes et des biens. Toutefois, « ces articles n’encadrent pas la manière dont est déterminé l’aléa de référence, ni les modalités amenant au choix des zones inconstructibles qui étaient jusqu’à présent décrits uniquement dans des circulaires et des guides », relève le ministère de la Transition écologique.
C’est donc l’objet du présent décret de compléter le cadre juridique existant en abordant notamment la gestion des espaces situés derrière les ouvrages de protection contre les inondations liées au débordement des cours d’eau et les submersions marines. La caractérisation de l’aléa de référence – représenté de manière cartographique selon quatre niveaux “faible”, “modéré”, “fort” et “très fort” – tient désormais compte à la fois du critère de la « hauteur d’eau » mais aussi du critère « dynamique de l’inondation » lié à la combinaison de la vitesse d’écoulement de l’eau et de la vitesse de montée des eaux.
Bandes de précaution
Le décret introduit par ailleurs dans la réglementation la notion de « bandes de précaution » inconstructibles situées derrière les digues (jusqu’ici applicable aux seuls ouvrages de protection contre le risque de submersion rapide), dont la définition est renvoyée à l’arrêté technique l’accompagnant. La largeur de cette bande de précaution est égale à cent fois la différence entre la hauteur d’eau maximale qui serait atteinte à l’amont de l’ouvrage du fait de la survenance de l’aléa de référence et le terrain naturel immédiatement derrière lui, sans pouvoir être inférieure à 50 m.
Comme souligné par plusieurs collectivités territoriales, lors de la consultation des projets de texte, cela peut être très contraignant sur des tronçons de digue dont la hauteur est très modeste, ce qui arrive par exemple fréquemment dans les zones urbanisées dans le delta du Rhône. Dans pareil hypothèse, en cas de surverse ou de rupture de l’ouvrage, l’effet de vague, de nature à mettre en danger les personnes, est relativement faible, et l’aléa peut ne pas être considéré comme très fort, et ce assez rapidement à mesure que l’on s’éloigne de l’ouvrage. La version finale du texte tient compte de ce paramètre. Lorsque les hauteurs de digue sont inférieures ou égales à 1,5 mètre, la bande de sécurité pourra en conséquence être réduite à 10 m.
La Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) s’est par ailleurs opposée à la disposition (modifiant l’article R. 562-15) fixant des prescriptions supplémentaires pour la protection des systèmes d’endiguement. Au regard des contraintes de gestion importantes en découlant pour les collectivités, la fédération a estimé « en l’état, l’approche insuffisamment approfondie » et demandé son retrait « le temps de la réécrire ». L’objectif de cet article était d’obliger le gestionnaire du système à informer les communes concernées des modifications envisagées ayant notamment, une incidence sur le niveau de protection ou l’étendue de la zone protégée. Ce point crucial ne peut, selon la FNCCR, être introduit sans une analyse précise des moyens d’articuler le PPRN avec les systèmes d’endiguement présents et leurs évolutions, en particulier lorsque la gestion des systèmes est confiée à un autre organisme que celui en charge de la compétence urbanisme. « Cela augure de relations très tendues entre gestionnaire de la digue (qui souhaitera régulariser la situation dans les plus brefs délais pour se couvrir juridiquement) et l’autorité en charge de l’urbanisme qui stoppe complètement le potentiel d’évolution d’une zone (qui peut regrouper l’hyper centre de la collectivité) », soulève la fédération.
Dérogations en zones inconstructibles
Autre élément important, le texte introduit des exceptions au principe d’inconstructibilité (nouveaux articles R. 562-11-7 et R. 562-11-8). Le secteur concerné par la demande d’exception doit notamment être « porteur d’un projet d’aménagement essentiel pour le bassin de vie ». Pour bénéficier d’une telle exception, une demande doit être adressée au préfet, dans le cadre de la procédure d’élaboration ou de révision du PPRN. Il est en outre indiqué que dans les zones non urbanisées, la réalisation d’une construction devra être compensée par une démolition dans une zone d’aléa de référence plus important.
Sans plus de précision, le texte ouvre également le champ des dérogations, prévu par le règlement du PPRN, à certains « types de construction », qui ne sauraient dans tous les cas, ni avoir pour vocation d’accueillir des personnes vulnérables ni être des lieux de sommeil.
Le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) s’était inquiété, en novembre dernier, « de l’absence de définition juridique de certaines notions figurant dans le projet de décret (centres urbains, zones urbanisées en dehors des centres urbains, dents creuses) » pour qualifier les limitations au droit de construire dans les zones figurant dans les PPRN, faisant valoir des risques d’interprétation divergente au regard du zonage prévu au titre du code de l’urbanisme. Visiblement un travail de réécriture à été réalisé sur ce point de façon à apporter des précisions supplémentaires et ainsi permettre un alignement des codes.